Point 4.4 b) de l'ordre du jour GF 01/14   

Forum Mondial FAO/OMS
des Responsables de la Sécurité Sanitaire des Aliments
Marrakech (Maroc), 28-30 janvier 2002

Pour une communication et une interaction efficaces entre les responsables de l'évaluation des risques et les responsables de la gestion des risques en matière de sécurité sanitaire des aliments

Document de réflexion préparé par l'Allemagne
à partir du rapport de la Consultation d'experts organisée par l'OMS sur
l'interaction entre les responsables de l'évaluation
et de la gestion des risques microbiologiques dans les denrées alimentaires
,
21-23 mars 2000, Kiel (Allemagne)



1. Introduction

Les experts invités par l'OMS ont fait pour l'essentiel les observations suivantes:

  • Les autorités responsables de la sécurité sanitaire des aliments dans les pays membres devraient structurer leur(s) système(s) à partir des risques encourus, selon une méthode qui prévoie notamment une communication et une interaction appropriées entre les responsables de l'évaluation des risques, les responsables de la gestion des risques et les parties prenantes.
  • La séparation des fonctions d'évaluation des risques et de gestion des risques est essentielle pour bien mener les activités d'analyse des risques.
  • L'indépendance, la transparence et la solidité des analyses et avis scientifiques sont essentielles à la crédibilité de ceux-ci. Cependant, il faut aussi que s'établisse un dialogue réel entre responsables de l'évaluation des risques, responsables de la gestion des risques et autres parties prenantes pour que les résultats de l'évaluation aient toute l'utilité possible et pour que les objectifs tant scientifiques que sociaux puissent être atteints.

En ce qui concerne les interactions entre responsables de la gestion des risques et responsables de l'évaluation, on a utilisé la terminologie adoptée ou envisagée par la Commission FAO/OMS du Codex Alimentarius. Il en va de même pour la description de l'analyse des risques.

2. Analyse des risques

L'analyse des risques a trois composantes: l'évaluation des risques, la communication des risques et la gestion du risque. Dans la terminologie du Codex, ces trois éléments sont définis comme suit:

  • Dans les "Principes et directives régissant la conduite de l'évaluation des risques microbiologiques" du Codex, l'évaluation des risques est définie comme processus à base scientifique comprenant les étapes suivantes: i) identification des dangers, ii) caractérisation des dangers, iii) évaluation de l'exposition, iv) caractérisation des risques.
  • La communication sur les risques est définie dans le Codex comme: échange interactif, tout au long du processus d'analyse des risques, d'informations et d'opinions sur les risques, les facteurs liés aux risques et les perceptions des risques, entre les responsables de leur évaluation et de leur gestion, les consommateurs, l'industrie, les milieux universitaires et les autres parties intéressées, et notamment l'explication des résultats de l'évaluation des risques et des fondements des décisions prises en matière de gestion des risques.
  • La gestion des risques est définie dans le Codex comme suit: processus, distinct de l'évaluation des risques, consistant à mettre en balance les différentes politiques possibles en consultation avec toutes les parties intéressées, en tenant compte de l'évaluation des risques et d'autres facteurs ayant une importance pour la protection de la santé des consommateurs et la promotion de pratiques commerciales loyales et, au besoin, à choisir les mesures de prévention et de contrôle appropriées.

Les responsables de l'évaluation des risques et responsables de la gestion des risques ont pour mandat de suivre les procédures suivantes:

Responsables de l'évaluation des risques:

  • identification des dangers,
  • caractérisation des dangers,
  • évaluation de l'exposition,
  • caractérisation des risques,
  • communication des risques en relation avec les tâches susmentionnées.
  • Responsables de la gestion des risques:
  • identification du problème,
  • définition du profil du risque,
  • description de l'objectif,
  • identification et définition du risque tolérable,
  • communication des risques en relation avec les tâches susmentionnées.

3. Séparation des fonctions d'évaluation des risques et de gestion des risques

Le projet de Principes de travail pour l'analyse des risques et les Principes et directives régissant la conduite de l'évaluation des risques microbiologiques font état d'une séparation des fonctions d'évaluation et de gestion des risques. La ou les personnes chargée(s) de l'évaluation des risques ne doivent normalement pas être les mêmes que le ou les responsable (s) de la gestion des risques. Le mieux est que les tâches d'évaluation des risques et de gestion des risques soient confiées à des personnes ou groupes fonctionnels différents. Cependant, il va de soi que dans de nombreux pays, une seule et même personne peut agir à la fois comme responsable de la gestion des risques et comme responsable de l'évaluation des risques. En tout cas, il est essentiel que les activités d'analyse des risques soient transparentes et convenablement documentées. Cela vaut pour toutes les interactions entre responsables de l'évaluation des risques et responsables de la gestion des risques ou pour la séparation des activités quand c'est une même personne qui en est chargée.

La séparation des fonctions est essentielle dans les activités d'analyse des risques si l'on veut que le processus d'évaluation des risques conserve toute sa valeur scientifique et évite des pressions politiques qui nuiraient à l'objectivité et à la crédibilité des conclusions. La distinction entre gestion des risques et évaluation des risques offre une garantie que les évaluations ne seront pas faussées par des idées préconçues sur les solutions en matière de gestion. Cependant, il faut qu'il y ait une interaction fréquente entre responsables de la gestion des risques et responsables de l'évaluation des risques pour que des décisions efficaces puissent être prises dans la gestion des risques. Une interaction effective est nécessaire si l'on veut que l'évaluation réponde aux besoins et préoccupations du responsable de la gestion des risques. Les responsables de l'évaluation doivent comprendre les questions du responsable de la gestion et les uns et les autres doivent prendre conscience des contraintes qui risquent de peser sur l'évaluation des risques. Les points forts et les limites de l'évaluation doivent être bien indiqués de façon que les utilisateurs des évaluations de risques en comprennent bien les résultats. Les interactions entre responsables de l'évaluation et responsables de la gestion ne prennent pas fin avec l'évaluation des risques. Il y aura souvent des échanges d'informations et de suggestions de la part des responsables de l'évaluation au cours d'activités ultérieures de gestion des risques, par exemple au stade de l'évaluation des options et de la communication des résultats aux parties intéressées.

La nature de l'interaction entre responsables de l'évaluation et responsables de la gestion des risques peut différer selon la structure des organisations nationales ou internationales. Par exemple, une distinction, tant dans l'organigramme que dans les fonctions, entre responsables de la gestion des risques et responsables de l'évaluation des risques est actuellement envisagée dans le système du Codex relatif à la sécurité microbiologique des aliments. Néanmoins, l'interaction et la communication sont essentielles pour une gestion efficace des risques, elles devraient comprendre la possibilité de mesures actives telles que le débat public.

Il y a des contraintes et des inefficacités dans les procédures de gestion des risques qu'applique le Comité du Codex sur l'hygiène alimentaire et il convient d'améliorer l'interaction entre les responsables de l'évaluation des risques et les responsables de la gestion des risques. Cela dit, il serait bon que la FAO et l'OMS étudient de près les modalités selon lesquelles les spécialistes des procédures de gestion des risques pourraient contribuer aux activités des consultations ad hoc FAO/OMS sur l'évaluation des risques tout en maintenant bien à chaque fois une distinction claire entre les fonctions d'évaluation et les fonctions de gestion.

4. L'interaction entre les responsables de l'évaluation des risques et les responsables de la gestion des risques

Les interactions entre l'évaluation et la gestion des risques peuvent être tributaires d'impératifs de temps, en particulier quand un problème de sécurité sanitaire des aliments exige que soient rapidement mises en _uvre des mesures transitoires ou des mesures d'urgence. Pour être efficace, la gestion des risques en situation d'urgence exige que le dialogue s'établisse tout de suite entre responsables de l'évaluation et responsables de la gestion. Cependant, même dans des situations de ce type, les responsables devraient chercher à établir des communications sans restriction pour que la nécessité de transparence soit satisfaite le plus possible.

L'interaction entre responsables de la gestion et responsables de l'évaluation est fonction du champ couvert par l'évaluation des risques. Souvent celle-ci a pour objet de déterminer le stade de la filière alimentaire où les interventions seront les plus efficaces pour réduire le risque sanitaire attribuable à une denrée et à un pathogène spécifiques. Une évaluation des risques peut également être entreprise pour déterminer l'efficacité économique des contrôles en vigueur ou évaluer une nouvelle technologie de contrôle. Dans ce cas, l'évaluation comprendra une liste d'options à considérer. Dans une situation d'urgence avec un pathogène nouveau, et si l'étiologie de la maladie n'est pas claire, la liste des options à examiner sera raccourcie.

5. Transparence

La transparence est un objectif essentiel de la méthode d'analyse des risques et on ne saurait en surestimer l'importance. C'est ce qui ressort de la Déclaration de Principes du Codex pour l'évaluation des risques en matière de sécurité sanitaire des aliments, des Directives du Comité du Codex sur l'hygiène alimentaire régissant la conduite de l'évaluation des risques microbiologiques et du projet de Directives du Comité du Codex sur l'hygiène alimentaire pour la gestion des risques microbiologiques. Pour qu'il y ait transparence dans une évaluation des risques, il faut que toutes les hypothèses, données, inférences et conclusions soient étayées par des documents explicites et diffusées pour examen et débat public. La transparence de la gestion des risques signifie que le processus est public et peut être examiné par les parties intéressées, y compris les parties prenantes et consommateurs susceptibles d'être touchées par le résultat de l'analyse des risques et des activités de gestion des risques.

6. Recommandations

Les recommandations ci-après de la Consultation d'experts qui s'est tenue à Kiel en 2000 méritent d'être débattues:

  • Les autorités chargées de la sécurité sanitaire des aliments dans les pays membres doivent structurer leur(s) système(s) de sécurité sanitaire des aliments dans une optique axée sur les risques qui prévoie une communication et une interaction appropriées entre responsables de l'évaluation des risques, responsables de la gestion des risques et parties prenantes.
  • La FAO et l'OMS doivent rechercher activement les occasions de promouvoir des activités internationales conjointes d'évaluation des risques et de gestion des risques entre leurs pays membres.
  • La FAO et l'OMS doivent encourager la réalisation d'études visant spécifiquement à dégager des informations nouvelles nécessaires pour appuyer les activités internationales d'évaluation et de gestion des risques dans le domaine de la sécurité sanitaire des aliments. Le meilleur moyen semble être de passer par les centres collaborateurs de la FAO et/ou de l'OMS, ce qui suppose que l'on établisse des protocoles, que l'on apporte une formation et que l'on élabore des plans d'échantillonnage judicieux pour étudier les risques d'origine alimentaire qui pèsent sur la santé humaine.
  • La FAO et l'OMS doivent insister sur la nécessité d'une communication fréquente et répétée qui vise en même temps à l'intégrité scientifique et reste libre de tout a priori dans les évaluations de risques.
  • La FAO et l'OMS doivent inviter le Comité du Codex sur l'hygiène alimentaire à prendre en compte les résultats obtenus par cette consultation dans ses efforts pour élaborer des principes et directives régissant la conduite de l'évaluation des risques microbiologiques.
  • La FAO et l'OMS doivent examiner de près les modalités selon lesquelles les experts en procédures de gestion des risques peuvent dialoguer avec les responsables de l'évaluation des risques participant à la Consultation ad hoc FAO/OMS sur l'évaluation des risques microbiologiques. Ce dialogue est particulièrement important lorsqu'il s'agit de décider du champ d'une opération d'évaluation des risques, d'élaborer une politique d'évaluation des risques adaptée à cette opération et de veiller à ce que les résultats de l'évaluation des risques soient le plus utiles possible pour la gestion des risques.
  • La FAO et l'OMS ainsi que les autorités nationales doivent accorder beaucoup d'attention aux besoins de formation des responsables de l'évaluation et de la gestion des risques de façon qu'ils puissent s'acquitter avec efficacité et efficience de l'ensemble de leurs responsabilités.
  • La FAO et l'OMS doivent faciliter les débats sur la nature et la valeur des objectifs en matière de sécurité sanitaire des aliments, en particulier dans le domaine microbiologique. Il ressort du rapport du Directeur général de l'OMS (EB 105/10, par. 10), que l'OMS est priée d'examiner rapidement cette question en coordination avec la FAO.
  • Les autorités nationales doivent admettre qu'il importe de bien distinguer les fonctions d'évaluation des risques et de gestion des risques tout en assurant une interaction transparente et appropriée entre les unes et les autres.